Hello mes Afroféminines, ou pas!

En me balladant sur la toile, j’ai réalisé à quel point les réseaux sociaux regorgeaient de créatrices et créateurs de contenu digital afros ou même tout simplement racisés. Lifestyle, mode, sport, entrepreneuriat, afrofeminisme, mode, beauté etc… Tout y passe et les abonnés sont au rendez-vous. Alors, la question que je me suis posée est : « Effet de mode ou réelle nécessité ? » Vous ne devriez pas être trop étonnés si je vous disais qu’à mon avis, leur présence est une nécessité n’est-ce pas ? Un homme politique français que je ne citerai pas à dit un jour qu’en démocratie, c’était la force des arguments qui comptait. J’ai donc décidé de trouver 5 arguments qui expliquent mon point de vue. Et parce qu’ensemble (à plusieurs) on va plus loin, j’ai recueilli des avis sur la question que j’ai partagé dans l’article mais j’attends les vôtres !

  • Raison n°1 : Rempart au manque de représentativité : Représentativité quand tu nous tiens. Voilà un mot qui fait couler de l’encre depuis quelques années mais peine toujours autant à être une réalité vécue. Un petit coup d’œil sur le public de la cérémonie des césars ou des Molières et vous comprendrez de quoi je parle. On est très à l’aise avec l’idée que les noirs excellent dans la musique et le sport mais qu’en est -il des autres domaines ? Sachez que je n’ai rien contre les sportifs. Je suis consciente des efforts et des sacrifices qu’ils endurent pour se hisser en haut de l’affiche. Mais tout de même… N’ y a -t-il pas de comédiens, de réalisateurs, de producteurs noirs, asiatiques, maghrébins (en tout cas non blancs) talentueux en France ? Le passage remarqué de Fary aux Molières cette année corrobore mon propos. Je crains qu’on ne puisse, aujourd’hui, dire qu’il n’y a pas de compétences dans ces domaines parmi les personnes de phénotype autre que blanc. En revanche, a-t-on envie de les voir ailleurs que dans la parcelle psychologique qu’on leur a « accordé » ? Non, je crains qu’il n’y ait que très peu de volonté pour faire bouger considérablement les lignes. Dans ce contexte,  les réseaux sociaux se sont avérés être un moyen de contourner une invisibilité imposée et bien souvent subie. Ils ont permis à de nombreux afro-descendants (mais pas qu’eux) de se faire connaître, montrer leurs talents et, au passage, d’offrir davantage de modèles de réussite pour une frange de la population qui n’en avait que peu. On trouve certes de mauvais exemples, mais il y en a de très bons. Alors, oui, merci youtube,  instagram, facebook and co d’avoir donné l’opportunité à tant de femmes et hommes talentueux de combler un trou béant, d’avoir permis à tant de personnes méconnues d’être davantage visibles, connues et entendues. Tout ça nous mène au second point.

Je pense que c’est une bonne chose que les afro-descendants se décident (enfin) à influencer quelque chose, surtout la perception d’eux même : « c’est à dire modeler la perception que nous avons du monde qui nous entoure et dicter (insidieusement bien sûr), le regard que doit porter le monde sur nous). Alain

  • Raison n°2: Réponse au besoin de rôles modèles : En parlant de rôle modèle, je repense à l’interview de Rachid Arhab et Djamel Debouze en 1993, au journal de 13h. Jamel demande au journaliste de présenter le journal en disant je cite « Bonjour, vous êtes bien sur le journal télévisé français de France 2, c’est Rachid Arhab, y a un problème ? » On pourrait penser qu’il s’agit d’une blague anodine mais, au-delà de la drôlerie, il a subtilement mis en lumière combien il était rare (à l’époque surtout) de voir des présentateurs du journal d’origine maghrébine. Je l’ai déjà dit, c’est tellement plus facile de se projeter avec des modèles qui nous ressemblent aussi physiquement, tellement plus facile de se rêver à leur place un jour, tellement plus facile d’imaginer qu’on va et qu’on peut faire comme eux sinon mieux. Oui, les afro influenceurs peuvent être une inspiration pour ceux qui les suivent ou peuvent véhiculer des modèles de réussite et ça a un impact considérable sur le mental. Et si vous avez des proches qui font de la compétition sportive (quand je vous dis que je n’ai rien contre le sport…), vous savez qu’une bonne partie de la compétition se joue au niveau mental. Supposons que la vie soit un championnat, dans lequel aimeriez-vous que votre progéniture joue ? En league 1 ou en CFA? Si nous voulons qu’ils aient envie de participer aux meilleures compétitions et la foi qu’ils peuvent y arriver, je crois sincèrement qu’il faut aussi leur montrer des Chimamanda Ngozi Adichie, Modibo Diarra (astrophysicien américain d’origine malienne qui a travaillé à la NASA), des Bertin Nahum (classé 4ème entrepreneur le plus révolutionnaire au monde après Steve Jobs, Mark Zuckerberg et James Cameron), des Sandrine Mubenga (pour cette dernière je vous laisse taper son nom dans google. Vous serez agréablement surpris …
  • Raison n°3 : Une bouffée d’air pour le mind set : Si la répétition est la mère des sciences, l’absence répétée en est une tout autant. J’ai eu la joie de m’occuper d’un groupe de jeune il y a quelques années et j’ai été frappée par leur état d’esprit. Péssimisme, manque de vision… Ces adultes en devenir avaient intégré qu’ils n’étaient capables que de peu de bonnes choses et qu’ils n’accèderaient jamais à certains milieux. Fait renforcé par le manque de représentativité qui, insidieusement, renforcent les stéréotypes. J’en veux pour preuve le titre du dernier livre de Rokhaya Diallo « Ne reste pas à ta place ». J’ajouterais bien derrière « Tu peux faire tellement plus ». Quel rôle les afro-influenceurs peuvent bien jouer ici ? Je pense qu’ils contribuent à nous réconcilier avec l’image que nous avons de nous-même. Ils créent ou renforcent (selon les cas) notre estime de soi et ce n’est pas du luxe dans notre construction en tant qu’individu. Ce n’est peut-être pas un hasard s’il y a depuis un certain temps autant de coach afro-descendants qui proposent leurs services, autant d’articles, de vidéos sur l’épanouissement personnel proposées par et pour eux etc… S’aimer, connaître sa valeur et l’assumer, ça vous change un être ! Étant donné qu’on ne peut donner que ce que l’on a reçu, pour sûr, nous transmettrons un bon état d’esprit autour de nous, à nos jeunes, à nos enfants si notre self-estime est au beau fixe. Et on n’oublie pas le mental de champion dont je parlais dans le point 2.

Je pense que nous devons avoir des afro-influenceurs. Mais à mon sens, ce doit être des personnes qui se concentrent sur des sujets importants, c’est à dire qui permettent aux noirs d’avoir une vision positive de ce qu’ils sont et évitent de tomber dans la caricature (en jouant à l’idiot du village ou en tombant dans la caricature de ce qu’attend la société occidentale d’un noir). Ils doivent également avoir le courage de questionner ce qui nous a été transmis. Géraldine

  • Raison n°4 : Les vainqueurs écrivent l’histoire : Vous avez peut-être déjà entendu cette phrase. Moi, je la reformulerai ainsi : » Celui qui a le pouvoir réécrit l’histoire à son avantage ». Par pouvoir, je n’entends pas seulement les finances mais je parle aussi du fait d’avoir une tribune, un micro, la parole. Avoir la parole ou plutôt prendre la parole confère un pouvoir extraordinaire. C’est là qu’on peut donner sa version des faits. Les gens ne sont évidemment pas obligés d’y adhérer et ce n’est pas grave. Dans les tribunaux, chaque partie a un temps pour donner sa version des faits, pour convaincre, alors il n’y a pas de raison que ce soit différent dans la vie de tous les jours. Même les histoires nationales se révèlent souvent être le fruit de la construction humaine alors pourquoi on ne pourrait pas écrire nos histoires et ou les transmettre à notre manière ? Les réseaux sociaux constituent une excellente tribune via laquelle prendre la parole sur des sujets qui nous concernent, donner notre vision des choses, raconter nos histoires. Si nous devions attendre que les médias le fassent, ce serait peine perdue. Quel intérêt y trouveraient-ils ? Puisqu’il est dans notre intérêt d’avoir la primeur sur nos points de vue, let’s do it.
  • Raison n°5 : On n’est jamais mieux servi que par soi-même : Un proche m’a récemment fait remarquer que mettre en avant des talents afro-descendants était une bonne idée mais que je ferais certainement preuve d’une réelle grandeur d’âme en proposant également des portraits de personnes qui ne sont pas noires. Je m’attendais à ce qu’on me le dise un jour puisque je me suis moi-même posée la question en me lançant dans ce projet. La réponse que je lui ai adressée était que cela pourrait effectivement refléter une grandeur d’âme mais que mon but était de contribuer à la valorisation d’une minorité peu représentée (non pas de faire montre d’une grandeur d’âme particulièrement, quoiqu’on puisse également trouver dans cette démarche une certaine grandeur d’âme, enfin, je crois …). Malheureusement, l’histoire nous a montré que le respect n’est pas un acquis mais qu’il se gagne, voire qu’il s’arrache. Une journaliste caucasienne me confiait, après une conférence sur le racisme chez les enfants, que les magazines ne mettaient pas de femmes noires à la Une de leur revue parce que ça ne vendait pas. Du coup, il me paraît évident que c’est à nous de créer des contenus qui nous mettent en avant, nous satisfont et que nous achèterons. Nous ne pouvons pas continuer à nous plaindre de ces choses et rester les bras croisés à attendre qu’on nous les apporte car cela ne se fera pas… Autant prendre le taureau par les cornes et véhiculer de nous l’image qui nous convient. La moisson est grande et heureusement, les ouvriers ne manquent pas. Dans une interview, Stephen Curry (basketteur de renom) a dit une phrase que je fais mienne: « Il n’y a pas de raccourci pour l’excellence ». Il faut travailler dur pour obtenir ce que l’on veut alors quoi de plus normal que nous travaillions à l’obtenir ? Quand on sait qu’il y a à peine quelques semaines, Marie-Aline Meliyi présentatrice sur LCI a publié un des tweets racistes qu’elle a reçus, je me dis qu’être afro-influenceur est presqu’ un acte engagé pour laisser aux générations futures un environnement plus ou moins sain.

Une fois ces arguments énoncés, sachez que pour moi, les premiers influenceurs d’une vie devraient être les parents. Ils sont les premiers modèles que nous ayons. Tout commence à la maison via l’éducation, la transmission de la notion d’identité avec tout ce que cela implique etc… Je ne vais pas m’étendre ici à ce sujet car j’espère en parler dans un article qui y sera entièrement consacré. Je suis curieuse de savoir vos points de vue alors ne soyez pas timides. Faites comme ceux qui se sont prêtés au jeu en répondant à la question  » Pensez-vous que les afro-influenceurs soient une nécessité, ou un phénomène de mode, donc passager ? » Si vous ne vous êtes jamais posés la question, c’est peut-être là l’opportunité de le faire. A la joie de vous lire.

Afrofémininement vôtre !

Sandgidemad